Le Canada.
Bon alors bien sûr je n’vais pas tout raconter en détail. De toute façon c’est un voyage que je ne risque pas d’oublier.
J’voulais juste parler de Jacynthe, Manuel et Olivier qui ont marqué ma vie au fer rouge d’un grand sourire. Et Jacynthe qui a rajouté quelques nouvelles notions de vie pour moi comme… en fait nan elle a surtout déjà consolidé des notions que j’avais déjà, notamment le Destin : rien arrive par hasard, ça devait arriver à ce moment là, de cette façon là… Et puis vivre au jour le jour aussi, et se contenter de ce que l’on a sans vouloir toujours plus et meilleur. Elle a aussi parlé lors d’une des veillées autour du feu du fait que dans sa culture autochtone, lorsque l’on perd quelque chose qui nous tient à coeur, c’est pas forcément mauvais signe. Au contraire, cela peut vouloir dire que l’on va recevoir quelque chose de tout aussi ou plus important encore. En clair, dans leurs croyances, dans leur vie, on va forcément recevoir tout ce qu’on a donné, en terme de valeur. Ca m’est arrivé d’y penser, mais c’est quand même toujours dur de se séparer de quelque chose que l’on aime. Et puis elle a aussi parlé d’une forme de vie après la mort mais plutôt dans le sens où la vie est juste un passage dans un espèce de circuit qui regrouperait plusieurs formes d’existences (animal, végétal, minéral). De là est associé à chacun un totem, un animal qui répond à nos questions dans nos rêves, si on le leur demande bien sûr. Jacynthe a expliqué que la nuit elle ne dort pas, elle travaille à travers les rêves, elle voit les gens qui viennent chez elle, ce qu’ils cherchent, ce pourquoi ils sont là, parce qu’ils ne sont pas là par hasard. J’aurais aimé lui demander ce qu’elle a vu me concernant. Mais l’occasion m’a manqué. Tant de choses encore à dire de cette femme qui porte la vie en elle. Une femme heureuse, emprise d’amour pour Manuel, rien que dans ses yeux ça se voyait. Ils se sont rencontrés très jeunes en Antarctique aussi, comment ne pas vivre une aussi belle histoire avec une rencontre pareille…
Manuel lui, est un homme dont du premier regard on ne saurait dire son âge, c’est étrange. D’ailleurs Jacynthe aussi. Mais finalement c’est pas très important. J’avais lu dans leur livre d’or que certains l’appelaient le "taiseux", parce qu’il ne parle pas beaucoup c’est vrai. Il parle espagnol et anglais, mais très peu français. Il est très discret mais on sent en lui un calme fort, une grande sérénité et une certaine osmose avec la nature. Jacynthe nous a même dit qu’il parle aux oiseaux. Il m’a regardé une seule fois dans les yeux, c’est lors des adieux. Ca m’a troublé. J’avais comme l’impression qu’il pouvait lire en moi.
Et puis Olivier, c’est juste la cerise sur le gâteau. Un grand garçon qui a tout a fait sa place parmi eux. S’il n’était pas blanc comme un cul on aurait pu le prendre pour un Indien lui aussi. Ca faisait 2 s’maines qu’il était avec eux quand on est arrivé, on aurait dit que ça faisait depuis toujours. Un rayon de soleil sur pied. Toujours de bonne humeur. Un sourire extraordinaire, une volonté incroyable mais beaucoup de sensibilité aussi je crois. J’ai été très peinée de quitter ce camp de tipis. J’me sentais chez moi là-bas, j’aurais pu y vivre et y travailler avec plaisir avec eux. J’aurais aimé, j’le jure. Et c’est pas l’eau froide ni la sueur qui m’aurait fait changé d’avis, loin de là…
Je me suis acheté un bracelet là-bas, pour me souvenir toujours de ce moment hors du temps et loin de tout qu’on a passé là-bas. J’aurais aimé garder contact avec Olivier mais ça ne s’est pas passé comme je l’aurais voulu (pour pas changer). De toute façon il a sa propre vie, j’suis qu’une touriste de passage à ses yeux. Peut-être que la vie m’étonnera, peut-être pas. Une chose est sûre, j’l’oublierai jamais.
Le Canada est un pays divisé je trouve. Moitié anglais, moitié français. Et ni l’un ni l’autre ne fait l’effort d’apprendre l’autre langue. La vie y est plus chère qu’en France sur pas mal de points mais je pense qu’ils gagnent mieux leur vie que les Français. Le travail pour les mineurs y est beaucoup plus développé d’autant plus qu’ils arrivent à associer études et boulot durant toute l’année, et pas seulement en période de vacances. Et ils ont l’avantage de pouvoir être autonomes avant nous puisque le permis peut se faire avant la majorité chez eux. Cependant ils ont les mêmes problèmes d’immigrants que nous et ils ne savent pas trop c’que c’est un bon resto. M’enfin, c’est une autre culture…
Dur dur de retourner à la vie normale. La preuve, j’me fais d’jà chier. J’suis avec Mat au téléphone, Chou est chez lui. Ca fait du bien. J’ai vu ma frangine aussi ce soir. Ca fait vraiment du bien aussi. Demain j’ai RDV au taff. Je commence mardi. J’espère que ça va bien se passer, je vais tout faire pour, j’me l’promets.
Allez, j’écrirai surement demain.