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toujours bien

Lo

C’est toujours bien. Les deux premières semaines de Juillet sont de très bonne tenue. Pourtant y avait tout ce qui fallait pour se casser la gueule, une accumulation des pires clichés (le prof quadra qui se saoule à mort avec ses anciens élèves parce qu’il assume pas de tromper sa femme - en vacances en Corse - avec la petite jeune fille qui lui a tapé dans l’oeil, c’est le genre de truc qu’aucun scénariste bas de gamme n’oserait sortir!), enfin c’était pas de la tarte, c’est toujours fort impressionnant de voir comment tu t’en sors. Tu as déjà du entendre de ces musiciens qui n’en foutent pas une rame mais qui jouent fabuleusement bien, et dont le jeu à une évidence à laquelle tu ne pourras jamais prétendre, malgré les heures passées à en chier sur ton instrument; c’est à peu près ce que m’inspire ton écriture. Forcément, c’est moins spectaculaire que pour les musicos, eux ils peuvent lancer une carrière en mettant leurs vidéos sur YouTube, mais ça n’arrive pas aux écrivains… Sinon tu serais la Julia Nunes de la littérature.
L.

Sara

Je ne suis pas une petite jeune fille qui lui a tapé dans l’oeil. Il n’est pas quadra. J’ai pas mentionné de "vacances" en Corse. J’suis pas scénariste de bas d’gamme. J’écris pas un roman ou un scénario. C’est ma vie. C’est mon journal. C’est bien, c’est gentil si sincère tout ça, mais c’est brut de décoffrage et ça n’a pas beaucoup de sens pour moi. Tu m’balances ça comme si j’étais venue te d’mander d’te pencher sur mon oeuvre pour me donner ton appréciation et tes remarques. Ca m’a arrangé la situation la première fois mais là c’est presque vexant. Je cherche pas à être écrivain ni à lancer une carrière quelconque.

Mon écriture t’inspire. Très bien. Donc tu écris. Partage maintenant.

Sara.

Lo

Nan, nan, rien de tout ça… Mais ça n’est pas "ta vie", comme tu dis, c’est une représentation de ta vie; et ce que je dis ne concerne pas ta vie, dont somme toute j’ignore tout, et que dans tous les cas, je ne me permettrais pas de juger. Je parle juste, d’une part, de l’énergie de l’écriture, et d’autre part, du fait qu’il existe, objectivement, des "clichés" littéraires ou cinématographiques. Je ne sous entends pas que les choses qui t’arrivent dans ta vie sont des clichés, ça n’aurait aucun sens; simplement, un certain nombre de situations, de comportements, de "personnages", font partie d’un répertoire de clichés dont la littérature et le cinéma ont abusé. A partir du moment où tu donnes une forme écrite et publiée à ton expérience, il y a une séparation entre ce que tu as vécu et ce qui apparaît dans le texte; à ce moment-là, il se peut que les histoires vécues deviennent des clichés. Ca ne dévalue pas l’expérience qui a eu lieu dans la vraie vie, mais ça complique considérablement l’écriture; or je trouve que là c’est brillant, parce que justement on n’est pas étouffé par le cliché, alors que si le style ne suivait pas, ça serait chiant à lire.

Sinon je ne me penche pas sur ton oeuvre, parce qu’il est un peu prématuré de parler d’oeuvre, et je ne te donne pas d’appréciations, parce que les appréciations c’est le langage de l’école. Je crois qu’on peut envisager des relations plus saines, et si notre siècle ne jure que par les évaluations (du monde du travail jusqu’à la téléréalité, du pôle emploi jusqu’aux réseaux sociaux), je pense qu’on peut pourtant continuer à dire ce qu’on pense d’une production, et argumenter. Ca n’a rien à voir avec le fait de mettre une note, de distribuer les bons et les mauvais points, bref d’infantiliser l’autre; au contraire, c’est une relation entre adultes responsables, basée sur la bienveillance et la foi dans l’intelligence de l’autre.

Enfin, mais ma phrase était peut être un peu tordue, ton écriture m’inspire une comparaison (avec la musique, voir la note précédente), et non pas m’inspire tout court. Par contre je lis tes textes avec intérêt, et encore une fois, ce ne sont pas les questions psychologiques ou biographiques qui m’accrochent; et pour tout dire, tu aurais tout inventé que ça m’intéresserait quand même.

Quant à l’écriture, c’est surtout pour moi un outil de travail et de réflexion, donc une bonne partie de ce que je fais n’est pas destiné à la publication, et le reste passe par des canaux de diffusion plus ou moins improbables. J’imagine que c’est ce que tu appelles un partage, même si je ne suis pas sûr que le partage soit le seul moteur de la publication.

En espérant avoir un peu précisé les choses.
L.

Sara

Tu lis donc mes textes pour l’écriture, et non pour le contenu. Chapeau.

Un outil de travail non destiné à la publication ? C’est vague. Un canal de diffusion improbable ? C’est étrange.

Puis-je t’en demander plus ? Je suis une curieuse insatisfaite.

Sara.

Lo

Et bien, par exemple, si une situation politique donnée me pose problème, j’arrive à peu près à penser qu’à condition d’écrire dessus; après le hasard fait que je peux être amené à diffuser le résultat aux gens dont je pense que le texte peut leur apporter quelque chose; après, le texte fait sa vie, ou pas. Dans d’autre cas c’est à usage purement privé, pour te prendre un exemple, récemment mon fils aîné à passé pas mal de temps à l’hosto, j’ai énormément écrit à ce moment là, par nécessité vitale et aussi pour m’éclaircir les idées, pour être plus efficace dans la relation avec les soignants, etc… Cet écrit là n’a pas vocation à devenir public, sauf s’il trouve une forme telle que je me dis qu’il peut être utile à d’autres gens. Par ailleurs, je peux être amené, parfois, à poster en réaction à un article de presse ou sur un forum, parce que ça me semble pertinent sur le moment, et que je pense que les gens disent vraiment de trop grosse conneries. Je peux aussi publier dans des revues si la rencontre se fait avec les gens qui l’animent, et si ça me semble avoir du sens de publier chez eux. Mais globalement, je préfère faire un texte "pirate" qui sera lu, et bien lu, par des gens que ça intéresse vraiment, et qui auront des choses à renvoyer sur le texte, plutôt que de publier "officiellement" dans une revue où personne ne va lire ce que j’ai écrit.
De façon générale, je ne parviens pas à saisir quelque chose avant d’avoir écrit dessus; il peut s’agir de chose très privées comme de choses très publiques, si cette distinction a un sens. Dans tous les cas, c’est avant tout une façon d’essayer de saisir le monde, qui est complètement déconnectée de la question de la publication. Je ne diffuse que si ça me semble avoir un intérêt pour d’autres que moi.
Par ailleurs, je m’intéresse à l’écriture sur internet pour des raisons que je ne saisis pas encore, puisque je suis en train de travailler dessus précisément. Mais en gros, pour ce que je capte pour le moment, mon problème est le suivant : j’appartiens à une génération qui a pratiqué l’écriture adolescente dans le plus grand secret, qu’il s’agisse de nouvelles, de poésie ou de journaux intimes, il était hors de question de rendre public nos écrits. A l’extrême rigueur, le ou la meilleur ami pouvait y avoir accès, et encore. Donc forcément, ce qui se passe sur le net depuis quelques années me pose question, parce que pour moi, l’intitulé même "journalintime.com" est impensable. Comment imaginer mettre en ligne ce que, précisément, ma génération s’obstinait à cacher dans un tiroir ?
Donc toutes ces questions m’ont amené à lire des masses de blogs, journaux et autres écrits du même genre. Je n’y cherchais pas de qualité littéraire particulière, et heureusement parce que la plupart ne sont même pas vraiment écrit en français. J’ai donc été particulièrement surpris quand je suis tombé sur tes textes, et je t’ai fait part de ce que j’en pensais. Ce sont des textes que je continue à lire par plaisir, ce qui n’est pas rien, parce qu’en général, quand je lis sur internet, c’est plutôt des trucs illisibles.
Quant aux questions psychologiques, et bien je ne peux pas investir affectivement sur quelqu’un que je ne connais pas… Alors je suis incontestablement un homme du XX° siècle. Je sais bien que pour votre génération c’est différent, que vous pouvez avoir une relation avec quelqu’un que vous n’avez jamais rencontré, mais pour moi c’est inconcevable, aussi inconcevable que de croire que des personnages de romans existent en vrai, comme le croyaient Don Quichote ou Emma Bovary. Donc contrairement à ce que tu sembles croire, je ne me désintéresse pas de toi : c’est juste qu’on ne se connaît pas.
Enfin, mais c’est anecdotique, je ne suis pas sûr que le ton que tu emploies dans ton dernier message soit des plus propices à la discussion : le langage de l’interrogatoire de police donne toujours un peu l’impression à l’interlocuteur d’être menotté au radiateur...
L.

Pardonne-moi. Je suis maladroite et brutale…

Ton passage sur la comparaison entre ta génération et la mienne (bien que j’n’ai au final pas d’idée claire de ton âge) m’a fait sourire. Il est vrai qu’c’est carément incongru de publier sur la Toile son journal intime. J’ai moi-même commencé de la manière traditionnelle : cahier planqué sous l’matelas, entre deux tiroirs ou sous la pile de t-shirts. Mais dans l’ère actuelle c’est plus attirant d’se servir d’un outil universel et "ludique" qu’est Internet. Toutefois, vu le succès de la chose, il est autant plus compliqué de rester discret et anonyme. Paradoxalement, certains persistent à publier publiquement, à la vue de n’importe qui, et donc de proches. Faut croire qu’on aime vivre dangereusement…

En effet, on n’se connaît pas. Je n’te demande pas de t’intéresser à ma vie. Je n’en ai cure. Pas d’malentendu. Mais ça m’paraît étrange de lire une chronique, ou un journal, régulièrement, sans m’intéresser un minimum, j’veux dire sans apprécier le contenu. Il m’est insupportable de lire un écrit qui m’emmerde royalement, pour ma part. Même si l’écriture est bonne. Par exemple, j’admire particulièrement les grands auteurs d’époque pour leur langage parfait, leur façon de s’exprimer si correcte. Pourtant, il m’est impossible de lire de Balzac. Ses expansions littéraires sont justes insuportables. Ce type écrivait pour écrire, ou alors il était payé au mot. Bref.

C’n’est certainement pas un moyen d’me mettre en avant, ni de vanter mes aventures. Je cherche à comprendre et animer la conversation, tout simplement.

Sara.

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