People Always Leave

Interview.

Aujourd’hui j’ai la flemme.

Hier soir j’ai commencé à écrire, deux fois. La première fois, fausse manip', tout a disparu. La deuxième fois j’avais pas capté que j’étais plus connectée. Ca m’a gavée parc’que j’avais des choses à dire, de la frustration à coucher sur papier, du feu à cracher. En fait j’ai surtout vomi sur Greg parc’qu’il m’a vraiment, vraiment exaspérée hier, à me reprocher des tonnes sans cesse, genre déblatérer dix minutes sur une erreur que j’ai faites, à tourner, retourner et re-retourner le couteau dans la plaie, encore et encore tu vois, jusqu’à c’que j’dise okay okay got it ! et que j’parte trotter plus loin. Très constructive sa méthode quoi. Et puis il en a encore rajouté une couche une fois de retour à l’écurie. Là j’l’ai pas laissé s’enflammer, j’ai soupiré très fort, suis descendue d’ma monture en vitesse, l’ai désellé, nourrie, ai rangé l’matos et me suis barrée. Il m’a quand même d’mandé quand j’ôtais mes bottes "do you hate me now because I’m chipping on you all the time ?". I do. Vieux con.

I’m over it now. I’m over him.

En c’moment j’bosse sur l’interview de Kirsty, cette fille qui m’a prise en stop en NZ avec sa famille. Elle veut publier un petit magazine sur son périple néo-zélandais et veut inclure mon interview. C’est cool, c’est la première fois que j’vais partager publiquement mon histoire. Plus ou moins. Sauf qu’une de ses questions me bloque.

11. Do you feel it is important to you to reconstruct the gender bias for women who want to travel independently ?

Si la question est : est-qu’une femme qui voyage seule courre des risques ? Oui.
Si la question est : est-c’qu’une femme qui voyage seule est avantagée ? Oui.
Si la question est : encourages-tu les femmes à voyager seule ? Oui et non.

Suite à cette réflexion j’ai surfé sur la toile et lu un article très intéressant sur une auto-stoppeuse qui partageait sa mauvaise expérience en 6 ans d’auto-stop à travers le monde. Le gars l’a emmené dans un garage isolé prétendant devoir y collecter des pneus et lui a fait des avances avec insistance une fois sur place en les enfermant dans le local. Elle s’en est bien sortie, il l’a pas touché, mais elle s’est remise en question après ça, tout comme moi après ma mauvaise expérience à Gold Coast. Sa première réaction a été de partager son expérience sur un site consacré aux femmes, histoire de chercher du réconfort je suppose. Au contraire la nana s’en est pris plein la gueule : tu l’as cherché, t’as qu’à pas faire du stop, t’as eu c’que tu méritais, j’espère que que ça t’a servi de leçon, j’en passe et des meilleures. Du coup elle a séché ses larmes et s’en est faite une idée. Oui, pour une femme, faire du stop comporte des risques, mais davantage qu’une serveuse dans une boîte de nuit ? Une infirmière ? J’veux dire elles doivent en prendre pour leur grade aussi et se faire draguer à tout va nan ? Surement beaucoup plus que nous les pouceuses d’ailleurs. En fait j’voudrais juste qu’on arrête de coller des étiquettes sur des trucs qu’on voit à la télé. Plus personne ne fait du stop de nos jours mais tout l’monde sait qu’c’est risqué, c’est quand même marrant nan ? On sait que conduire c’est risqué mais tout l’monde prend sa voiture tous les jours. Ce manque de jugeote, de réflexion évident me troue l’cul. J’en ai marre d’me justifier mais j’laisserai personne me dire que j’suis stupide de faire ça. Les cons regardent la télé, les autres font du stop.

Desfois j’me dis que j’voudrais un peu militer à c’propos, défendre ma cause, en parler et essayer d’faire changer l’image du stop. Le problème c’est que la réalité est là : oui, c’est risqué, oui j’me suis fait prendre par un gros dégueulasse qui m’a fait des avances (assez courant dans l’milieu d’après d’autres témoignages) et je crois que simplement mentionner ça va provoquer l’effet contraire et flipper tout l’monde. Je crois qu’il faut choisir les mots avec beaucoup d’attention ou tourner le truc à l’envers genre oui c’est risqué mais putain la plupart du temps qu’est-c’que tu t’marres ! J’pense souvent écrire des articles ou en partager d’autres sur FB mais, c’est vrai, j’ai peur de passer pour la tarée, la hippie, la dévergondée, la meuf d’la famille que personne ne comprend et qui fait tout pas comme tout l’monde, genre la vieille tante folle que tout l’monde a. C’est vrai, j’ai peur des préjugés, j’veux pas attirer l’attention, j’veux pas gueuler dans l’oreille de sourds. J’suis plus que contente d’en parler avec des gens qui posent la question mais déballer sans réserve, nan merci. Tu vois, j’ai retenu la leçon : fermer ma gueule.