Inner child
J’écris à chaud, on vient juste de raccrocher.
J’ai eu un flash. Je me suis vue, moi, enfant, 7 ou 8 ans, ma mère qui tente en vain de me faire dire quoique ce soit. Moi, fermée comme une huître. Incapable, physiquement, d’émettre un son. Me demandant si ma voix avait disparue ou pas. Ma mère qui crie, qui se retient certainement de me secouer, de me gifler. Et moi, telle une tombe, un poids lesté, immobile, immuable, comme si je faisais partie à part entière du canapé. C’est limite si je respire encore. Et les pensées qui m’assaillissent, qui rejoignent les propos de ma mère. Mais parle putain. Dis quelque chose. Tu fais pitié. T’es ridicule. Cette situation est ridicule. Et puis au final t’es allée trop loin donc t’es obligée d’aller jusqu’au bout. Ça fait une demi-heure que t’as rien dit, que ta mère te hurle dessus, c’est pas maintenant qu’il faut l’ouvrir. Une fois ma mère au bout du rouleau partie dégueuler sa frustration ailleurs, j’osais même plus bouger. Je restais là, assise sur le canap', toujours comme cette putain de pierre tombale. Je crois que je priais pour disparaître. A cet âge je croyais en Dieu, je priais souvent. Prends-moi pitié, achève-moi, sors-moi de là.
J’ai réalisé aujourd’hui que j’étais toujours cette petite fille. Que rien, absolument rien, entre ces deux versions de moi à ces instants précis n’avait changé. Je suis toujours cette putain de tombe. Ce bloc de marbre. Impénétrable. Froid. Gelé. Dans un silence abyssal.
Sauf que je n’ai pas le même interlocuteur. Deux opposés même. Et pourtant ma langue ne se délie pas pour autant.
J’ai eu cette pensée que je m’auto-punissais. Je pense inconsciemment ne pas mériter l’écoute et la compréhension de Greg alors je m’enferme. A l’époque je pensais sûrement que ma mère ne me méritais pas. Et je ne faisais que le prouver.
Je me souviens même pas si je pleurais ou pas. Je crois pas. Je refoulais. A en avoir mal. On peut dire que c’est la seule différence…